36ème Variation • Le corps humain nomade de la nature

Le corps de l’homme commence donc sur injonction du corps de la nature, à murmurer son existence.

Pour la première fois dans l’histoire de la matière, il se met à patauger dans le micmac. Son premier objectif est de s’identifier dans le cosmos. Ce processus d’identification de l’onto-génétique par le phylogénétique ne lui est pas propre, ne le caractérise pas. La matière, comme Matière Intersubjective Circulante, comme un MIC, suit ce processus d’identification, d’auto-contrôle, depuis des milliards d’années. C’est la caractéristique même du protocole matérialiste d’ajustement. Les variables d’ajustement sont les médiats –non immédiats donc– de cette différenciation évolutive. La matière cherche constamment (constante intersubjective) à s’adapter à l’univers terrestre. C’est que la matière dont le cosmos universel est formé, n’est pas en adéquation avec ce cosmos.

La contradiction est ontogénétique. La matière se naturalise en trouvant et en pratiquant le jeu dialectique géo-historique des variables d’ajustement. La nature –en ce sens– est une organisation d’un mode de production écologique et donc poétique. La production des rapports de production –dans ce cadre– est tout d’abord toujours pour cette fameuse et agaçante « première fois ». La première fois que la nature se met en marche, elle établit des rapports de production et de reproduction, par le fait, originaux. Or, au début du 3e millénaire, les spécialistes s’accordent à estimer que trois étapes marquent cette marche évolutionniste. Il faut toutefois tout d’abord re-souligner que cette évolution ne peut être admise comme un progrès. Le développement des différenciations donne des diversités riches et intenses tendant à un monde meilleur, certes.

Mais cette dynamique doit être –dans son approche – dégagée, autant que faire se peut, de tout anachronisme. La matière circule, mais, à strictement parler, elle ne se « modernise » pas. Elle existe en tant que force d’adaptation à son environnement. C’est l’homme, dans le cadre de sa dénaturalisation, de sa dématérialisation (comme on l’a suggéré) qui va inventer la notion biaisée de progrès.

Selon donc ses spécialistés, les minéraux et l’eau sont premiers.

À ce corps minéral vient bientôt au cours des milliards d’années, s’ajouter par différenciation des variables d’ajustement, le corps végétal, le monde végétal. Une seconde civilisation, une seconde culture (après celle minérale et aqueuse) se met en place.

La graine se souvient de l’arbre qu’elle va devenir. A ces civilisations, puissantes, dynamiques, flamboyantes, vient se super-poser le monde animal. Ce monde animal est le résultat produit par les deux premières. Il ne s’agit pas donc d’un ensemble formel, logique. Il faut aborder cette super-position cohérente co-errante comme relevant d’une théorie des quantas, balbutiante au XXIe siècle. Il ne s’agit que d’un ensemble pré-historique. La pré-histoire n’existe pas. Cette prétendue Préhistoire, cette prétention anachronique n’est qu’anthropologique. Est-il besoin de re-re-répéter que la matière, la fille de la nature, organisée selon les trois ordres minéral, végétal, animal se passe durant des milliards d’années du corps de l’homme.

N’importe quel géologue sait cela. Le généalogiste épistémologue, l’historien de l’histoire devrait s’en souvenir plus souvent. Il y a un après le corps de l’homme parce qu’avant il n’existait pas d’homme. C’est d’une banalité foudroyante.

L’ethnocentrisme explose ici. Pour autant, un corps humain de la nature se met à se dénaturer, à se dématérialiser. Cette négation de la matière et de la nature va conduire tout son processus évolutif. Le corps de l’homme va mesurer ses variables d’ajustement en niant ses origines. C’est parce que je ne suis ni matériel ni naturel que je deviens un corps humain. L’intention politique, idéologique, anthropomorphique est aberrante.

Mais pourquoi pas ?

Tant qu’à patauger dans le micmac, autant commencer les pieds dans la merde méthodologique. Du pied gauche de préférence, il paraît que cela porte bonheur…

Mais comme tout nomade, l’homme emporte la terre sous les semelles de ses bottes de contrebande de 9 lieux.

Non pas 7 en effet, mais 9, pour respecter la constante quantitative intersubjective, CQ1I .

La constante qualitative intersubjective, la CQ2I, ne vient qu’une fois la CQ1I mise en place par et dans le procès de mise en place du mode de reproduction démographique qui s’installe lui-même. Cette délégation de pouvoirs que la nature délègue au corps de l’homme n’est pas une délégation de pouvoir du pouvoir. Le pacte passé entre cette nature civilisée à l’extrême et le corps sauvage (disons-le comme ça par dérision) de l’homme implique un acte de confiance réciproque.

Cochon qui s’en dédit.

L’homme va vite passer du cochon au sanglier prédateur. Le chemin dit « de la liberté » (expression stupide) se révèle à terme un chemin de croix, sanglant et infantile.

Cette délégation de pouvoirs, biogénétiques, ne présuppose pas du résultat. Il s’agit bien d’une co-errance dans le micmac. La matière elle-même a pris le temps –des milliards d’années– pour asseoir son mode de production écologique et poétique. Compte tenu de la matière, sous forme de la nature, existe depuis bien avant l’homme, l’expérience qu’elle tente avec ce dernier ne cherche pas à conduire à un monde meilleur. La nature expérimente une délégation de pouvoirs, comme elle le fait systématiquement. Cette modalité systémique lui est ontogénétique. Elle attend les résultats expérimentaux, voilà tout. Faut-il pour autant imaginer que la nature, intersubjectivité en action, arrive à prévoir les conséquences de cette fâcheuse expérience du corps humain ? Cela supposerait un don prédictif singulier, dont on n’a pas trace. Le chaman seul peut-être eut des visions prémonitoires.

Mais de là à anticiper le sanglant triomphe du capitalisme, il y a loin de la coupe aux lèvres.

D’ailleurs, en ces temps reculés, il n’existait pas de coupe…

Toujours est-il toutefois que la dématérialisation dénaturalisante du corps de l’homme implique, par contre, une négation du mode de production écologique, donc un anti-premier-communisme. Si cet anti-communisme n’est pas encore un capitalisme entendu au sens de Marx, il est toutefois un anti-communisme radical. La première fois, le premier mode de production (écologique), va devoir être remplacé par un autre nouveau mode de production, agricole celui-là. Ce premier nouveau mode de production –acquis cette fois-ci et non donné – implique pourtant l’émergence de l’esclavagisme. La terre devient peu à peu l’esclave de l’homme. Il ne s’agit pas encore, déjà, d’une exploitation de l’homme par l’homme, de l’exploitation du corps de la nature par le corps de l’homme. Ce corps à corps va tourner au désavantage de la nature. C’est que l’homme, en se dénaturalisant, exploite des énergies fossiles. Or celles-ci n’ont, avant lui, jamais été poussées à la rentabilité immédiate. Le pétrole, le gaz, le charbon par exemple, symbolisent au 3e millénaire ces énergie fossiles non-renouvelables et épuisables. Mais la première énergie du genre, c’est la terre cultivable. Le mode de production écologique n’a jamais exploité cette énergie, pas plus que les autres au demeurant. Faut-il donc alors présupposer un diabolique complot ? La nature, prévoyante, aurait constaté le danger potentiel, la menace humaine. En poussant cette espèce animale, la nature aurait voulu se débarrasser de l’homme, en le poussant au suicide. La société de la Grèce antique n’aurait pas mieux fait avec Socrate, contraint à boire la ciguë et à acheter le coq au chant duquel il dut boire. L’homme aurait donc fait son temps et rien de plus.

L’homme a la montre et la nature a le temps.

Cette hypothèse complète triste, vicieuse, pourrait possiblement avoir son sens.

Seul problème : je ne vois pas lequel.

Force est donc d’admettre le caractère aléatoire –quantique de l’expérience géo-historique que la nature fait avec le corps humain, OGM à part entière.

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